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mercredi 7 décembre 2016

Lendemains incertains...


Très tôt nous avons appris
à poser un pied devant l'autre.

Que de chutes nous sommes-nous ainsi évitées !

Pourtant le plus souvent, nous marchons
en aveugle dans nos existences respectives.

Alors que faire
si nos expériences ne nous donnent
pas le don de double vue ? 

© ema dée

lundi 5 décembre 2016

Mon premier artbook sur les femmes en préparation... (reporté)

Fidèles internautes,


D'aucuns-es se demandent peut-être où j'en suis dans la réalisation de mes petits livres personnels et ils auront raison de se poser la question.

L'expérience m'a montré que si je voulais tenir la distance, c'est-à-dire donner corps sous une forme ou une autre aux projets éditoriaux qui agitent mes rêves et peuplent mes nuits sans sommeil, il fallait accepter différents temps successifs ou imbriqués : des temps de création intensive, des temps de recherches azimutés, des temps calmes, ordonnés et des temps de vacuité - ceux-là même qui permettent de se ressourcer, de prendre du recul, de faire des rencontres ou de se redécouvrir. 

Depuis  le mois de mars, je prépare en secret un petit objet qui me tient à cœur, un artbook (ou portfolio "amélioré), d'un volume raisonnable (entre 40 et 60 pages) et dans lequel j'expose une sélection d’œuvres plastiques et graphiques sur un sujet, une douce obsession qui traverse mes œuvres, comme un trait d'union : la femme dans tous ses états.

La plupart des réalisations sélectionnées (dessins, illustrations et objets) ont été montrées ici ou sur le blog Improzine, dans mon portfolio en ligne sur Ultra-book, dans des expositions individuelles ou collectives, ou encore, dans mes premières autoéditions. 

 
Vue de l'intérieur en cours...

L'idée n'est pas d'être redondante puisque s'y ajoutent quelques créations inconnues. Ensuite, toujours encline à expérimenter de nouvelles formes de promotion  et d'exposition personnelles, j'ai cherché à les mettre en regard les unes par rapport aux autres dans le but de faire émerger sinon de nouvelles significations, au moins de chouettes vis-à-vis. Enfin, j'aime me dire que grâce à ce livre, j'offre la possibilité à chacun, de se promener dans mes œuvres comme dans un musée de poche.

Cette sélection ne fut pas aisée, car il a surtout s'agi, tout au long de ce nouveau projet, de trouver un équilibre - j'espère le bon - entre l'envie irrésistible de tout montrer et la création d'une maquette claire, agréable, sans surcharges, d'une part,  et d'autre part, d'opter pour une mise en page à l'écoute des publications actuelles mais qui sache être singulière malgré tout...

Rejeter une image, en faire entrer une autre, la montrer en totalité ou de manière fragmentaire, zoomer sur un détail ou au contraire, proposer l'image en pleine page... sont autant de questions que la création de ce troisième livre a soulevées. Questions qui se posent de manière récurrente puisque je les rencontre également, lorsque je prépare un book en prévision d'une rencontre avec un éditeur.

Vue de l'extérieur en cours...

SISTERS just want to have fun est mon premier artbook né de ces cogitations, interrogations et envies.
 
Comme pour le recueil Peurs. Images & Textes publié en 2014, il sera disponible dans ma boutique Blurb, sur demande, ou sur un prochain salon auquel je n'hésiterai pas à vous convier !

À bientôt. 

© ema dée

dimanche 4 décembre 2016

Ema Dée fait son ciné sur Improzine...

... à l'occasion de la journée nationale du Cinéma indépendant. Organisée par la FASCiné, la Fédération des Associations de Spectateurs de Cinéma, elle a lieu chaque année le 3 décembre.

Quels sont ses objectifs ?  Ce sont notamment la "défense des salles indépendantes et des cinémas de proximité" ainsi que la promotion du "cinéma non-mercantile, favorisant la diversité culturelle et la personnalité des acteurs et des créateurs", dans un paysage artistique et culturel dominé par la multiplication des salles multiplex, la réduction drastique des copies de films d'auteurs et par conséquent, de la durée de leur diffusion en salles, face à l'hégémonie des blockbusters, par exemple. Pour plus d'infos, c'est ici.
*
Des objectifs qui ne laissent pas insensibles les joyeux drilles de l'équipe Improzine, eux-mêmes fans de films d'auteurs. Chacun de ses membres a eu envie de célébrer l'événement une seconde fois*. Je rappelle le principe défini par Thomas Cloué : imaginer l'affiche d'un film, écrire un synopsis alléchant et rédiger la semaine suivante (si les conditions d'emploi du temps le permettent), une critique de chacun des films proposés.  Cette année, l'incitation lancée par N'Karna est : inventer un film à suspense pour les studios Badass Song. Pour suivre cette célébration originale, cliquez ci-dessous :

http://improzine.blogspot.fr/search/label/FESTIVAL%20IMPRO%20DES%20CIN%C3%89S

© ema dée

* Un formidable événement déjà mis à l'honneur en 2015.

jeudi 1 décembre 2016

L'automne en retard avec Gustav Klimt

Très cher automne,



Je me suis beaucoup inquiétée pour toi ;
Voilà pourquoi je t'écris cette lettre.
Tu as été si tardif 
et en même temps, si court comme
évincé par Dame Hiver,
Ou avais-tu hâte de t'éclipser ?
Pourtant, les arbres se paraient de rouge, de brun 
et de jaune feu. 
Pourtant, mes nuits étaient enfin molles et enfin alanguies
après la chaleur violente apportée par Messire l'Été.

Je me suis beaucoup inquiétée
Car tu as été si froid tout d'un coup.
Toi qui m'a habituée à tes souffles chaleureux,
tes lumière rougeoyantes à la tombée du soir.
Tu as été si triste et si mélancolique, et si plaintif !
Tous ses vents glacés et entêtés !
Pourquoi tant d'amertume et tant de froidure ?
Toi qui a toujours été si doux, calme et contemplatif.


Je me souviens il y a quelque temps,
Tes rues grises aux manteaux demi-saison, aux chapeaux élégants
et légers,
Tes allées pavées, humides et amoureuses,
Tes jardins encore verts, inégaux, expressionnistes,
Tes cours d'écoles aux grandes bottes de pluie rouges ou bleu marine,
Tes dimanches matins aux réveils tardifs, 
Tes heures de béatitude silencieuse, les bras accoudés à la fenêtre,
Tes courses folles dans les bois persistants dégoulinants de gouttes 
transparentes,
Tes sauts de joie dans les flaques de feuilles mortes,
Tes collections de plumes ramassées sur les chemins terreux de la forêt 
domaniale,
Et tes promenades oisives dans les marchés couverts 
aux joues rosies.

Je me suis beaucoup inquiétée pour toi.
Tu es passé sans poser tes valises.
Comme pressé de repartir.

J'espère que ma lettre te trouvera en bonne 
santé.

Affectueusement,
Ema
*
Encore plus concernée par le temps qui passe et les saisons qui défilent - toujours au rendez-vous mais jamais semblables - je poursuis mon cycle d'hommages mêlant clin d’œil aux artistes que j'aime, écritures poétiques et expériences graphiques. Cette fois-ci, j'ai choisi de dire merci à l'artiste autrichien symboliste, Gustav Klimt (1862-1918), un des plus éminents membres de la Sécession de Vienne et de l'Art nouveau. J'admire son hymne à la beauté féminine, sensuelle, douce et froide à la fois, ses portraits intimistes, ses grandes fresques décoratives, savamment organisées autour d'allégories, et son talent hors pair dans la création de motifs ornementaux complexes et raffinés.

Je voulais aussi rendre hommage à l'une de mes saisons favorites depuis mon enfance, celle de la rentrée des classes, de la chaleur douce des mois de septembre et d'octobre, celle de la chute molle et gracieuse des feuilles sur les chemins, des dimanches reposants où je pouvais lire sans interruption, ou ne rien faire à part regarder la course des nuages à travers des rideaux d'une pluie fine et ininterrompue : l'automne.

Enfin, j'ai choisi pour cette occasion de célébrer la couleur et le motif (qui me procurent en même temps un plaisir enfantin et une souffrance bien adulte tant la combinaison des deux est à chaque fois périlleuse), ainsi que la tendresse (dans un portrait de famille imaginaire) et le souvenir.

Rendez-vous un peu avant la fin de l'hiver, pour une nouvelle composition.

© ema dée

Ascension vitale ?


À tout petits pas, j'avance vers le précipice qu'est la vie.

© ema dée

dimanche 20 novembre 2016

Une journée de plus en faveur des droits de l'Enfant

Ce dimanche 20 novembre 2016, je mets en scène - à ma façon - l'article 9 de la Convention internationale des Droits de l'Enfant : l'enfant a le droit de vivre avec ses parents...

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... à partir du moment où c'est dans son intérêt me permettrais-je d'ajouter.

Un événement discrètement suivi depuis 2013.


© ema dée

samedi 19 novembre 2016

C'est la journée internationale des hommes !

Voici un extrait de la composition que j'ai réalisée pour cette journée spéciale*. Je me suis amusée à imaginer des portraits d'hommes à partir de particularités que j'ai pu observer chez certains. Saurez-vous deviner lesquelles ?

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Petit piège : ces caractéristiques ne sont pas spécifiques à la gent masculine ; elles existent aussi chez les femmes !

*Il ne faut cependant pas oublier les fondements de cette journée qui sont de valoriser des actions positives menées par les hommes et de réfléchir à leur condition partout dans le Monde. 

Réponse possible : rêveur — joueur — infantile — séducteur.

Un événement déjà célébré ici.

© ema dée

lundi 7 novembre 2016

Les couleurs de ma création graphique sur Tumblr


 

Le projet baptisé sobrement Le Horlart à 1,99 et développé sur Tumblr se poursuit gaiement*.

S'il s'agissait au départ de raconter naïvement des tranches de ma vie par le biais de la publication d'une seule image quotidienne représentative, accompagnée d'une phrase brève (et pleine d'esprit !), l'idée s'est un peu transformée. De l'intérieur et au fil des jours, a émergé l'envie d'étudier/ s'exercer/ expérimenter sur un mois, une technique ou un sujet. En outre, le temps de réalisation de chaque petit dessin s'est un peu étiré.

Le contenu ou la tendance "à se raconter" comme la dimension expérimentale de l'exercice demeurent, en filigrane ; chaque "cycle" interroge/ met en scène un ou plusieurs aspects de ma création au travers du prisme d'une contrainte posée au départ. En septembre, je vois la vie en noir et blanc ; en octobre, le froid s'insinuant dans les maisons, je veux de la couleur :

1 - Un air de ?

 

Mon mois de septembre s'est intéressé à la création de portraits à partir de photographies de personnalités connues du Cinéma, de la Musique, de la Peinture et dans une moindre mesure, du Sport et de la Littérature. Ce fut l'occasion de me confronter au modèle et à la question de la ressemblance. Je livre 30 portraits expressifs, en tirant un peu la langue, l'exercice est ardu, ne va pas de soi, donne des résultats irréguliers. Il a d'ailleurs soulevé quelques questions comme :
 
- Comment dépasser la confrontation entre ce que je sais/ vois/ veux montrer de mon modèle et comment il/elle se présente à travers le kaléidoscope déformant que représente Google Images  ?

- et d'une manière plus générale, comment réussir le petit saut d'un langage graphique vers un autre, par exemple, du graphisme en traits colorés très libres au dessin au trait noir à visée "réaliste" ?

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2 -  Mon bestiaire rigolo

 

En octobre, je me consacre à la représentation d'animaux. Ce cycle prolonge d'une certaine manière l'envie de faire des portraits et de rapprocher la question du fond ( = l'animal doit être reconnaissable, je m'appuie, pour ce faire, sur des photographies documentaires) et de la forme (= une envie de graphismes colorés pour faire suite à la plongée dans une production en noir et blanc du mois précédent.) Je me fabrique ainsi au fil des jours frileux qui passent une collection de bestioles bizarres et fantaisistes.

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* Ces petites collections d'images - 214 au jour d'aujourd'hui ! -  me donnent forcément des envies de développements et d'approfondissements ultérieurs :


Cet article fait suite à celui-ci.


© ema dée

vendredi 28 octobre 2016

Un peu de Langue et de Culture créoles au déjeuner ?

En cette journée festive où il convient de célébrer la richesse de son héritage culturel* et évoquer ses enjeux, penchons-nous sur un des aspects fondamentaux de la Créolité, sa langue, et plus précisément, attardons-nous un moment sur un mot particulier, d'origine inconnue et presque disparu aujourd'hui - malheureusement, le verbe créoler. Très en vogue dans la diaspora créole jusque dans les années 1960-1970, il fut rayé des manuels scolaires et des dictionnaires Créole-Français/ Français-Créole à cause de son incapacité à s'ouvrir à la Modernité. De récentes réapparitions de ce mot - confidentielles et très localisées - semblent prouver néanmoins sa vitalité et son permanente actualité.

créoler :

- Pimenter agréablement une conversation : Il créole divinement ! 

- Fait d'agrémenter un plat pour une fête familiale : La mère créolait dans sa cuisine depuis le lever du jour en écoutant la radio France Culture.  


- Réunir des matériaux de natures et de provenances disparates pour la composition d'une pièce délicate : L'artiste Hervé Télémaque créole ses oeuvres peintes.
 
- Défendre un point de vue avec force mouvements de poignets et de hanches dans une assemblée publique : L'annonce de la baisse du prix de vente à l'exportation de la banane guadeloupéenne fit créoler les cultivateurs mécontents.

- Être capable de s'adapter à environnement de dimensions physique ou symbolique étroites : Parce qu'elle créolait bien, l'étudiante trouva rapidement sa place dans des associations universitaires internationales influentes.

*

Verbe du 1er groupe - le verbe créoler est transitif direct
Le verbe créoler peut se conjuguer à la forme pronominale : se créoler
Le verbe créoler se conjugue avec l'auxiliaire avoir

Par exemple :

Indicatif
- Présent
Je créole
Tu créoles
Elle, il, on créole
Nous créolons
Vous créolez
Elles, ils créolent


Indicatif -  Passé simple
Je créolai
Tu créolas
Elle, il, on créola
Nous créolâmes
Vous créolâtes
Elles, ils créolèrent 


"Tous voulaient créoler de concert ; ils créolèrent donc ensemble sans interruption jusqu'à minuit telles des hordes de volatiles." (Duf. L'env. du Mad., 2015, p. 157)


* Une première illustration du sujet se cache ici.

© ema dée

mardi 18 octobre 2016

Je me souviens de ma première semaine du Goût


Du 10 au 16 octobre dernier, a été célébrée un peu partout en France, la fameuse semaine du Goût, instaurée il y a 27 ans pour promouvoir l'éducation au goût et l'expertise culinaire des chefs et des artisans en France. Ainsi, au restaurant quatre**** comme à la cantine, petits et grands gourmands ont pu laisser s'emballer leurs papilles et faire ripaille autour de l'idée de mieux manger pour vivre mieux.

Improzine n'a pas été en reste et a eu envie à sa manière de se joindre à la liesse qui a festoyé en Province et à Paris.

Il paraît que la mémoire des odeurs est la plus forte d'entre toutes les mémoires ; le goût est indissociable des autres sens, du toucher, de la vue... mais il entretient avec l'odorat une histoire d'amour particulière. 

Sentir serait se souvenir. Sentir serait goûter un peu.

http://improzine.blogspot.fr/search/label/Semaine%20du%20Go%C3%BBt

Impossible pour moi de retenir plus longtemps les images qui remontent par vagues sucrées - salées depuis ma mémoire : 

... Je me souviens d'un plateau or et argent recouvert d'huîtres baveuses et dégoulinantes un soir de Noël
Je me souviens de la barbe à papa rose et dodue des fêtes foraines qui disparaissait en fils sucrés et aériens dans ma bouche
Je me souviens d'une langue de bœuf brune et plate sous sa sauce orange parsemée de curieux points verdâtres
Je me souviens des boules de coco blanc à pompons rose fushia importées des Antilles
Je me souviens de pépins de pastèque
Je me souviens d'une pâte de fruits
Je me souviens des bonbons à la violette de la boulangerie rue Henri Say
Je me souviens des mots en lettres rondes et claires sur le bord de mon assiette de soupe au vermicelle
Je me souviens des pommes acides aux joues rouges volées et dévorées en cachette dans un verger privé
Je me souviens des artichauts à la vinaigrette
Je me souviens des mini barquettes de groseilles écarlates aperçues rue Saint-Ouen
Je me souviens de la tranche de pain d'épices nappée de beurre salé mangée au centre aéré
Je me souviens de la pulpe rouge d'un quartier d'orange sanguine qui dégoulinait sur mes doigts à la cantine
Je me souviens des dattes au miel de la mère de Fatima
Je me souviens des murs de vignes noires du Périgord 


Je me souviens d'une boule de glace au melon dans sa gaufre au caramel achetée Place de la République
Je me souviens de cigarettes en chocolat
Je me souviens des bananes frémissantes dans le beurre-rhum brun-citron-cassonade
Je me souviens de buissons de mûres et de fraises des bois sous une pluie bretonne
Je me souviens d'une île flottante
Je me souviens de sucettes plantées dans un jardin d'école maternelle
Je me souviens d'un gros carré de chocolat noir 100% cacao et de sa noisette énorme et beige couverts de mousse chevelue
Je me souviens de soucoupes volantes mauves fondantes et piquantes sur la langue
Je me souviens du jus d'orange en poudre 
Je me souviens de la purée de légumes tricolore aplatie lissée à la fourchette soigneusement puis projetée sur mon voisin hilare
Je me souviens du pain chaud tout juste sorti du four le dimanche avant la messe
Je me souviens de mes colliers en sucre à croquer
Je me souviens d'éclairs au café
Je me souviens d'un mille-feuille dégusté péniblement
Je me souviens de la peau dorée - grasse et croustillante - du poulet rôti-frites du jeudi midi
Je me souviens de mes orgies de citrons jaunes
Je me souviens d'un plat de blettes drôlement suspectes 
Je me souviens d'un bol de lait de chèvre servi sur un nuage...

© ema dée

mercredi 12 octobre 2016

La saveur délicate de l'imprévoyance


Dans le cas où
Peut-être que si
Dans l'attente de
Prévoir un plan de secours

Des fois que ?

Si jamais je devais
Au cas où il faudrait
S'il convient plutôt de
Penser à une alternative à

Qui sait ?

S'il arrive que
On ne pense jamais à
Parfois c'est quand même
Mieux d'avoir une autre idée

C'est plus commode !

Mais ça peut empêcher de
Le fait d'avoir pensé que
C'est comme si déjà

Alors on se précipite vers
Alors on se projette vers
Alors on se prépare à
Un échec cuisant
Ou une réussite de petite envergure
Ou un aboutissement de seconde zone

Donc
Il faut s'empêcher de
Éviter absolument de
Surtout ne pas

Autant que faire se peut.

© ema dée

dimanche 9 octobre 2016

Une mouette lancée dans l'Espace


J'écris la plupart du temps à partir de mes souvenirs et de réflexions personnelles sur mon propre parcours ou je me projette dans les interrogations de mon entourage. Par jeu ou par contamination. La référence à la structure du conte traditionnel, à des procédés de découpages (journal intime, liste, compte à rebours, dialogue, abécédaire) ou encore à la mécanique du rêve ou de la pensée - souvent obsessionnelle - soutient la rédaction de mes textes narratifs et poétiques.

L'écriture et l'invention littéraires prolongent mon expérience quotidienne - vécue plus que pensée - et font émerger en les lissant pour les embellir ou mieux les étudier mes souvenirs enfouis. En cela, elles me permettent de réécrire ma vie. 

En quelque sorte.

Une contribution est une réelle stimulation et un cadre très valorisant pour bousculer mes habitudes littéraires, les questionner et les mettre à l'épreuve de nouveaux sujets qui sont autant d'espaces - inédits ou restés dans l'ombre - à conquérir par les mots, que d'occasion d'explorer mes faces cachées - inhabitées encore, mais partageant avec mes idées fixes un lien de proximité.

C'est dans ce mouvement créatif que je réponds à l'appel à contribution lancé par la revue Espace(s) pour son n°13, Traces et résidus.

*

https://www.facebook.com/revue.espaces/
 

La revue fait partie des nombreuses actions conduites par l'Observatoire de l'Espace, laboratoire arts-sciences du CNES (Centre National d'Études Spatiales), dont l'objectif est de "rapprocher dans une culture commune les univers de la création et des sciences".  Chaque numéro de la revue est construit "autour d'une thématique différente" et rassemble des "textes contemporains variés tant par leurs genres littéraires que les profils de leurs auteurs."

Le CNES développe un programme intitulé Création et imaginaire spatial dont le but est de "jeter de nouvelles passerelles entre l'Espace et la Création artistique". C'est une vraie opportunité offerte aux artistes - et dans toutes les disciplines - d'avoir un accès privilégié à l'univers spatial et de proposer un regard singulier sur les questions et problématiques soulevées hier, aujourd'hui et demain, par l'exploration spatiale.

*

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Le sourire de la Mouette, cahier de voyage. p 162 à 165

"La Mouette" est le surnom donné à Valentina Terechkova, ouvrière du textile, sélectionnée pour être la première femme à effectuer seule un voyage spatial à bord du Vostok 6 en 1963. Intégré au chapitre Exploration de la revue, mon texte "poético-documentaire", nourri à la source de la réalité, se présente comme un extrait d'un cahier de voyage rédigé par la jeune astronaute au cours de cette expérience. Avec un brin d'ironie, il s'intéresse à la dimension émotionnelle de cette aventure...

Un numéro auquel ont participé ou contribué :
Jakuta Alikavazovic, Éric Pessan, Hélène Frappat, Christine Montalbetti, Loïc Pantaly, Olivier Perriquet, Vincent Odon, Cédric Hoareau, Fanny Chiarello, Thomas Vinau, Nicolas Tardy, Philippe Annocque, Fabienne Radi, Olivier Bleys, Coline Pierré, Mariette Navarro, Sabine Macher, Charles Pennequin, Karin Serres,  Magali Lefebvre, Marie Gallimardet, Eloïse Lièvre, Luvan, Gabriel Mettewie et moi, donc.

Pour découvrir les activités de l'Observatoire de l'Espace et suivre son actualité, c'est ici : http://www.cnes-observatoire.net/

Pour découvrir tous les numéros de la revue Espace(s) déjà publiés, c'est là :

© ema dée

mercredi 28 septembre 2016

Au pays des merveilles électromécanomaniaques de Gilbert Peyre

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À peine quelques jours après son ouverture, je visite l'exposition de Gilbert Peyre l'électromécanomaniaque.

Installé à la Halle Saint-Pierre, son Oeuvre s’expose, varié, surprenant, magique, devant les yeux de visiteurs conquis, amusés, intrigués, séduits ou sur la réserve, mais en tous cas, assurément interpellés par ce théâtre d'une féérie un peu déglinguée, ce cabinet de curiosités parlantes.

Amateurs, curieux et connaisseurs de tous âges peuvent choisir d'être guidés, d'entendre quelques secrets de fabrication, ou de se laisser aller à des interprétations personnelles et à une visite nonchalante. Chaque pièce aura, c’est certain, son petit moment de gloire, pourra se donner en spectacle et chuchoter son message singulier, durant quelques minutes, sous le regard complice et vigilant d'un guide transformé, pour l'occasion, en maître de cérémonie.

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C’est toujours inattendu, poétique ou drôle.  Certains oseront parler d’un brin de « cynisme » : ici, un vélo d’enfant sans conducteur pleure, là, une femme sans tête se déhanche langoureusement, dévoilant un érotisme à fleur de peau, à côté, une jeune fille danse avec élégance dans son corps de lampe de chevet, plus haut, un déshabillé rose pâle coquin séduit un pantalon un peu strict, et plus au fond, une armoire bien agitée claque ses portes… de joie, de terreur, de colère ou... d’extase ? 

... Un bras seul se tord d’amour. Reptilien. Une dispute conjugale a lieu. Soudain...

L’exposition présentera donc différentes pièces produites par l'artiste autodidacte : de ses toutes premières petites sculptures charmantes et étranges à ses réalisations récentes dites « électropneumatiques », en passant par ses objets animés, ses pièces mécaniques et ses œuvres électromécaniques.

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Pour celle, celui, ceux qui auront le temps, il y a aussi à voir une vidéo reprenant le parcours de l'inventeur, à travers ses créations initiales d’abord, c’est-à-dire ses objets animés, marionnettes traversées de vide, héros et héroïnes de récits sans paroles ou presque : chacun et chacune vaquent à ses petites affaires répétitives, entêtées, mouvementées. Ensuite, il y a la présentation de sa première sculpturOpéra, intitulée Le piano, une création de grande envergure qui contient des œuvres qu'il sera possible de voir ailleurs, plus tard, séparément : Le Coq, deux verres amoureux qui trinquent ou La Ménine, par exemple. Cette pièce ambitieuse semble synthétiser à postériori toute l’esthétique de Gilbert Peyre : le mouvement et le temps, la rencontre et l'assemblage, l’amour, la métonymie et la citation, des sentiments tels que la colère, la surprise ou la joie, l’humour et la poésie bien sûr, mais surtout, l’utilisation de pièces de collection chargées de souvenirs et de matériaux dérisoires (rebut, élément brut, objet récupéré) de plus ou moins grande taille qui seront ensuite assemblés pour prendre place dans une histoire particulière qui leur donnera une nouvelle valeur, une présence différente, une place de choix : poupée, peluche, œil, pantalon, chaussure, masque, vaisselle, armoire, squelette, carte à jouer, tête d’animaux, éléments végétaux, boîte de conserve, bouteille…

... La grivoiserie se dispute peut-être au drame et à l'ironie ?...

Je découvre ainsi des pièces qui m’enchantent telles que l’incroyable haltérophile, la très séduisante femme sans tête, la gracieuse Ménine ou l’hypnotique danseuse du ventre. Cette exposition est aussi l’occasion pour moi de revoir des pièces fortes présentées dans une mise en scène inédite : J’ai froid, Le Coq, La petite fille et Cupidon. Comme la première fois, je reçois un coup au cœur devant le charme bizarre de l'intimidante installation J'ai froid... J'éclate d'un rire excité et ravi devant l'hystérie collective - orgasmique ? - qui agite tous les acteurs de la sculpturOpéra Cupidon...

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Je goûte la joie des visiteurs, leur surprise, leur ébahissement, leur fascination pour l'univers à la fois fantastique, décalé et poétique de Gilbert Peyre. Je partage également leur curiosité et leur perplexité enfantines devant certaines œuvres : "que va-t-il se passer là, et après, et ensuite ? Ah, c’est déjà fini ?! On peut en voir encore, non ! Ah, pas tout de suite ! Bon... Et ça, comment ça tient ? Et, qu’est-ce que ça dit ?...  Ça a parlé, hi, hi, t’as entendu ?!... "

... Pas à pas, de l'émerveillement collectif au plaisir individuel en secret...

Tel un marionnettiste, il donne vie à des personnages humains ou animaliers familiers, danseuse, équilibriste, conducteur de train, coq, singe quêteur, ourson en peluche… Une vie d'automates bien singulière qui montre toutes ses ficelles et câbles électriques. Cela n'est pas dit, mais face à leur complexité et leur précision savantes, on devine l'artiste penché avec tendresse et méticulosité sur ces pièces qui révèlent une véritable maîtrise en ingénierie électrique. Avec le doigté d’un chef d'orchestre, d’un metteur en mouvement, d’un grand assembleur de matériaux, pièces, fragments dérisoires ou mémoriels avec du vide, Gilbert Peyre fabrique de troublants poèmes visuels.



Pour vivre sa propre expérience de l'événement :
Exposition Gilbert Peyre l'électromécanomaniaque
Halle Saint-Pierre 
2, rue Ronsart, Paris 18ème
Du 16 septembre 2016 au 26 février 2017

© ema dée

dimanche 25 septembre 2016

Retours sur une commande d'anniversaire



De temps en temps, il arrive une commande pour un dessin original. Elle est toujours la bienvenue : c'est comme relever un défi, puisqu'il m'est demandé de produire, pour une date précise, un dessin avec des contraintes précises elles aussi (format, couleur, genre), mais dans mon style, bien sûr ! 

Quelle demande ?

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En juin dernier, une amie me demande de produire un dessin pour l'anniversaire de son frère. Il s'agit de faire un portrait de lui à partir :

- de plusieurs photos de famille* en couleurs et en noir et blanc, prises à des âges et dans des contextes différents ;

- d'informations données oralement, c'est-à-dire quelques grands traits de caractère et des anecdotes qui créent un lien entre le sujet et moi : par exemple, son frère aime rire et possède un sens de l'humour décalé. Il apprécie la lecture de bandes dessinées. Sa femme est d'origine irlandaise. Enfin, son travail dans la Police est très important dans sa vie.

- du goût prononcé de mon amie pour les œuvres graphiques en couleur. Elle me rassure sur ce point, elle apprécie mes dessins en noir et blanc comme mes compositions plus "picturales".

- de son souhait d'offrir un portrait reconnaissable mais pas forcément hyper réaliste. Elle connaît bien mon style et l'étendue de mes possibilités de création dans le domaine du portrait.

Maintenant, au boulot !

Avec toutes ces informations, il m'est facile de me mettre au travail. La seule inquiétude qui a disparu dès que j'ai commencé à dessiner - bien qu'elle ait eu une fâcheuse tendance à pointer son petit nez de temps en temps - fut de faire le portrait d'un homme.  Je dessine plus spontanément des femmes, des adolescentes ou des fillettes et sans modèle le plus souvent. L'inquiétude sera peut-être la même si je reçois un jour une commande pour dessiner le portrait d'un bébé ou d'une femme très âgée.  C'est d'ailleurs pour me mettre en condition, que du côté de mon projet éphémère Le Horlart à 1,99, je décide de dessiner, en parallèle, un peu plus de sujets masculins.

La proposition ?


Quand je dessine pour une occasion spéciale (concours, contribution, fête), il y a souvent plein d'idées qui se bousculent ou parfois, rien du tout. Pour me dépatouiller de la situation, une étape incontournable : la recherche documentaire et les études au crayon et au pinceau à partir de photos. A chaque fois, je farfouille dans ma pinacothèque personnelle, je me balade sur Internet, j'examine et j'examine encore les images que j'ai sous les yeux, le crayon à la main. Pour cette commande-ci, avoir des photos assez différentes m'a été très utile.

Au final, deux idées un peu plus nettes se sont hissées au-dessus de ma pile d'intuitions embrouillées et une troisième qui n'a absolument rien à voir avec les attentes exprimées. Je réalise trois esquisses au crayon et à l'aquarelle que je soumets. Ainsi, mon amie a face à elle :

- exactement ce qu'elle a demandé ;

- exactement ce qu'elle m'a demandé mais dans une mise en scène plus "barrée";

- une ébauche pour un projet de dessin complètement hors sujet, mais qui peut se révéler intéressant.

C'est à ce moment qu'il faut noter clairement les petites corrections comme : opter pour une autre couleur, ajouter un détail significatif, déterminer le format définitif...

Dans la solitude de l'atelier...




Mon amie choisit le dessin qui correspond le plus à ce qu'elle attend. À moi, ensuite de bien garder à l'esprit tout ce qu'elle m'aura précisé entre la première demande et la seconde, notamment, ne pas utiliser de jaune dans la composition ! Heureusement, j'emporte toujours avec moi, mes fidèles assistants, grand carnet de croquis, calques, feutres et crayons, pour faire et noter les ajustements nécessaires.

Un peu de temps passe entre cette étape-ci et la remise du travail terminé. Dans cet intervalle, je suis seule face au portrait dont les contours se dessinent peu à peu. C'est un moment tout aussi délicat : je sélectionne avec soin le papier, lisse ou granuleux, rigide ou souple, ainsi que les couleurs dans la technique appropriée (soit aquarelle soit encre Ecoline, avec des traces de crayon) et l'outil le plus adapté pour faire l'encrage dans le "style BD" suggéré par mon amie, l'incontournable feutre pinceau japonais. La composition se précise, mais j'avance pas à pas, armée d'une grande rigueur.

Quand l’œuvre est finie, une sensation curieuse m'envahit : je suis contente et à la fois inquiète. Et si j'avais mal compris la commande ? 

Ô satisfaction de bon aloi quand tu nous tiens !

Le moment où j'ai remis la commande fut un poil impressionnant. Pas de raison de s'angoisser pourtant, puisque toutes les étapes ont été pour ainsi dire "verrouillées" des deux côtés. Du côté de mon amie comme du mien. Il vaut mieux s'être très bien comprises.

Je la félicite d'avoir eu l'excellent goût de s'adresser à moi ; je me félicite d'avoir développé au cours des années, une méthode de travail suffisamment saine et organisée pour pouvoir fournir ceci :



Chassez le naturel, il revient, il revient !

Évidemment, je n'ai pas pu résister à l'envie de faire quand même la seconde proposition, juste pour ma collection personnelle ! Travailler sur deux compositions à la fois demande une bonne gestion du temps, du cadre défini et de ses envies, certes, mais c'est un moyen efficace pour gérer ses idées parasites, rester concentrée et ne pas ressentir de frustration. Ainsi, dans le dessin ci-dessous, j'ai laissé libre cours à ma fantaisie et j'ai expérimenté des éléments trop rares dans mes productions actuelles, le fond coloré et les mots écrits à la main.

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*Pour des raisons évidentes, je ne publierai pas les photos de famille qui m'ont servi de point de départ.

© ema dée

jeudi 15 septembre 2016

Un été en fleurs naïves avec Camille Bombois

 

C'est l'été,
chaud, clair,
bleu sans nuage, jaune éclatant.

Sur la plage blanche et dorée,
dans la montagne pourpre et verte,
près d'un étang clapotant,
sur un bord de route qui tremble,
dans un fauteuil urbain à grands accoudoirs
populaires,
la morne nonchalance des vacances au Pastis.

C'est l'été,
dénué de vent et
retenant ses gouttes fraîches jusqu'à l'aurore.

Les jupes fleuries légères vélocipèdes,
les chemises bigarrées attablées,
les shorts vagabonds, les robes très lectrices
les sandales délassées déjeunant au parc,
les toits ouvrants, les fenêtres à persiennes,
fêtent la douceur sereine du repos.

C'est l'été,
suant sous son chapeau de paille,
moite des paumes et des dessous de bras
chauves,
les cils perlant.


Sous les érables aux feuilles parfois palpitantes,
sur les bancs trois places en face à face,
sur les chaises en fer chaud bosselé,
sur les pelouses tachées de pétales,
les volatiles sautillant,
les abeilles en sarabande,
la libellule noire et vert émeraude,
célèbrent la suspension du temps moderne, laborieux
et répétitif.

C'est l'été,
vidée, allégée, entre parenthèses,
en retard ou absente, la vie ici-bas.

Bientôt le réveil de la cité commune.

Les bras tendus de listes prescriptives,
les jambes en rayons compressés pressés dépassés,
la nuque et le dos très imposables
se préoccupent des lendemains politico-économiques.

L'été s'achève.

Heureusement,
des grains de sable blond dans les plis du sac,
une fleur séchée entre les pages à gros caractères
d'un roman moyen,
un brin d'herbe coincé entre les spirales
d'un carnet de dessin,
les couleurs aqueuses de vues naïves sur le motif,
les compiles musicales de la Fête nationale
chez les pompiers,
les spectacles forains,
les biscuits secs au goûter pris à minuit,
les promenades des âmes siamoises dans les jardins
publics envahis
et mes courbes pudiques sur ton iris transparent.

*

Cette composition s'inspire des œuvres 
Les beaux contes bleus (1925) et Les bas noirs avec journal (1930).

Chaque saison est l'occasion pour moi, dans une composition à la manière de, de célébrer à la fois le temps qui passe sans jamais être le même et le travail d'un artiste. 
Il s'agit aujourd'hui du peintre naïf français Camille Bombois (1883-1970) dont je découvre les œuvres colorées, généreuses et empreintes d'une drôlerie simple, en visitant les collections permanentes de la fondation Dina Vierny-Musée Maillol, il y a quelques années. Puis, alors que je visite le LaM en avril dernier, je me retrouve à nouveau face à ces portraits  de dames joufflues aux formes rondes, cette sensualité de la chair dans des mises en perspective un peu fausses et ces scènes banales et nostalgiques...
Pour découvrir ou redécouvrir l'art de Camille Bombois, c'est par exemple ici. Prenez un siège, la vidéo dure 6 min 46.

Bonne projection et belle rentrée à tous !

p.s. : profitez-en aussi pour voir tous mes tableaux saisonniers et portraits hommages.

© ema dée

vendredi 9 septembre 2016

Dans le pull noir de Sonia Rykiel

La créatrice de mode, couturière et designer française Sonia Rykiel s'est éteinte le 25 août 2016. J'ai eu envie de rendre un hommage particulier à cette grande dame à la chevelure feu et toute de noir vêtue.  En cherchant quel dessin produire, je me suis souvenue de la première fois où je l'ai rencontrée.

Ce que je vis d'abord d'elle, ce fut son nom. (Mais c'était bien avant de savoir ce qui se cachait derrière et ce qu'il signifiait.) Il était écrit en grosses lettres, d'un noir lisse et satiné, sur un pull tout simple, en laine à petites mailles, et noir aussi. Une femme courte et rondelette portait ce pull - enseigne, en permanence comme un fétiche ou un haut pyjama, au-dessus d'un pantalon en cuir vert olive. Elle enseignait l'Histoire-Géo dans ma classe de 3ème B.

Je la trouvais bien insolite, cette enseignante.

Sa chevelure brune, coiffée en une très longue natte qui lui arrivait jusque sur les fesses, fouettait l'air quand elle se retournait pour nous regarder prendre des notes sous sa dictée. Comme une figurante de dessin animé pour enfants, elle avait un corps expressif, en forme de bouteille d'Orangina : une petite tête, des épaules étroites et tombantes, une poitrine abondante, une taille large, avec des cuisses généreuses, des mains aux doigts effilés et aux ongles vernis et des pieds minuscules, serrés dans des bottines en cuir noir à bouts pointus. "Elle devait chausser du 36 !" je me disais.

tous droits réservés © ema dée
Je me rappelle son visage étroit ; sa peau avait, en toute saison, le teint hâlé comme une tourte. Son nez fin et pointu, légèrement busqué, était chaussé de lunettes aux montures épaisses en plastique noir signé d'un "SR" doré. Une frange coupée net lui cachait les sourcils et lui caressait presque les paupières. Cette frange trop présente semblait la gêner ; se la coupait-elle elle-même ?

Je pensais qu'elle devait être un peu paresseuse pour s'habiller tout le temps de la même façon, boulotte et singulière dans son pull noir Sonia Rykiel, son pantalon en cuir vert et ses bottes de sorcière ventripotente.  J'imaginais sottement un intérieur domestique fonctionnel, une garde-robe modeste et réduite à l'essentiel, trois ou quatre pulls noirs, deux, peut-être trois pantalons verts, et une seule paire de chaussures. Pour toute sa vie de professeure. Je me posais souvent cette question quand je la voyais entrer dans notre salle de cours dans son ensemble pull noir tagué + pantalon vert : "Est-ce qu'un professeur peut être un fan de ?"

J'ai découvert le travail de Sonia Rykiel quand j'étais en dernière année de lycée. Puis, j'ai suivi de loin ses créations, surtout grâce aux magazines et à la télévision.

C'est en faisant l'esquisse au crayon de ma composition que le souvenir de ma petite enseignante de collège rondelette est revenu. Je me suis alors installée dans cette image douce et drôle. Je retrouvai ainsi la période où j'illustrais mes devoirs de petits croquis dans la marge, où je rêvais devant la diffusion télévisée des défilés de mode, de devenir un jour styliste pour messieurs, de faire le portrait des grandes dames du cinéma et d'écrire les aventures inédites du Club des 8. Cette période où penchée au-dessus de mon cahier, la main tachée d'encre de stylo à bille et suspendue dans l'attente de la prise de notes à venir, j'entendais Mme Sylva commencer invariablement son cours en disant d'une voix ferme et distincte : "Vous notez point, à la ligne, vous notez !"
tous droits réservés © ema dée
Peut-être qu'au cours de l'année, Mme Sylva a porté une chemise jaune, un pantalon rouge ou des bottes de sept lieues, mais curieusement, je ne m'en souviens pas. Je me rappelle juste de ce pull en lainage noir avec dessus, ces grosses lettres en tissu satiné et lisse et de ces lunettes signées SR. En doré.

Voici donc mes salutations personnelles - sincères bien que tardives - à la reine du tricot qui a beaucoup fait pour le monde de la Mode et les femmes, et en particulier pour celles aux proportions généreuses. La boucle est bouclée!

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© ema dée